
Pratique des managements fees, vers un assouplissement de la jurisprudence ?
Auteurs : Ghislaine BETTON, Camille MICHEL
Publié le :
11/07/2024
11
juillet
juil.
07
2024
La convention de management fees permet à un dirigeant mandataire d’une société de se faire rémunérer non pas, directement, par le versement d’une rémunération qui lui serait payée par la société lui ayant octroyé son mandat, mais indirectement par la société prestataire de services et rémunérée à cet effet par la société bénéficiaire.
La jurisprudence remet, depuis plusieurs années, très largement en cause la déductibilité des rémunérations indirectes de dirigeants, que ce soit la Cour de cassation qui prononce leur nullité pour défaut de contrepartie ou lorsqu’elles font « double emploi » avec les fonctions de dirigeant ou, plus récemment, le Conseil d’Etat, qui remet en cause la déductibilité de la charge considérant qu’il s’agit d’un acte anormal de gestion. Par ailleurs, l’URSAFF, s’il estime que la rémunération versée au titre de ces conventions est excessive pourra également adresser un redressement au prestataire.
Une jurisprudence récente éclaire un peu le débat.
Par un arrêt « Collectivision » rendu le 4 octobre 2023, le Conseil d’Etat a jugé que le fait pour une société de verser une rémunération indirecte à son dirigeant, par le biais de management fees ne relève pas nécessairement d’une gestion commerciale anormale. Toutefois, encore faut-il que cette rémunération indirecte des fonctions de dirigeant remplisse plusieurs conditions, à savoir :
- Ne pas emporter un appauvrissement de la société à des fins étrangères à son intérêt. Au sens du droit fiscal, un acte anormal de gestion implique un appauvrissement de la société à des fins étrangères à son intérêt. Or c’est ici que la décision distingue clairement le droit des contrats et le droit fiscal. Si le juge du contrat peut annuler une convention de management fees, faute de cause licite, ceci n’implique pas automatiquement la qualification d’un acte anormal de gestion par le juge de l’impôt. A défaut d’appauvrissement de la société à des fins étrangères à son intérêt, l’acte anormal de gestion ne peut être qualifié.
- Avoir été approuvée par les organes sociaux compétents pour déterminer la rémunération du dirigeant et avec une volonté assumée de rémunérer indirectement son dirigeant. Cette approbation est valablement justifiée par le contrôle a posteriori réalisé par l’assemblée générale d’approbation des comptes ou par la rédaction des statuts sociaux.
- Cour administrative d’appel de Versailles, le 7 mai 2024 qui a jugé que les honoraires versés par une filiale à sa holding au titre d’une convention de management fees et correspondant à la rémunération du dirigeant ne constituent pas un acte anormal de gestion et peuvent ainsi être déduits du résultat de la filiale ;
- Conseil d’Etat, le 26 avril 2024 qui a rendu une solution similaire dans le cadre d’une convention de management fees conclue entre une société et son actionnaire majoritaire en vertu de laquelle ce dernier mettait à disposition du bénéficiaire l’un de ses salariés en vue de l’exercice des fonctions de président.
Par ailleurs, si la jurisprudence du Conseil d’Etat s’assouplit, rien ne laisse penser qu’il en ira de même pour la jurisprudence de la Cour de cassation qui, rappelons-le, peut prononcer la nullité de la convention de management fees et ordonner ainsi la restitution des rémunérations perçues à ce titre.
Il s’agira donc de rester particulièrement vigilant dans le cadre de la conclusion de conventions de management fees. Le Cabinet PIVOINE vous accompagne en la matière.
Historique
-
PRÊTS INTERENTREPRISES
Publié le : 24/10/2024 24 octobre oct. 10 2024Corporate, droit de sociétés, financementLe prêt entre sociétés a toujours été très encadré pour ne pas faire obstacle au monopole bancaire. La loi du 6 août 2015 dite Loi Macron a pourtant étendu la possibilité de conclure des prêts interentreprises et autorisé certaines d’entre elles (SAS, SARL dont les comptes sont certifiés...
-
LA FAILLITE PERSONNELLE
Publié le : 10/10/2024 10 octobre oct. 10 2024Corporate, droit de sociétés, financementLa faillite personnelle est une sanction judiciaire sévère infligée aux dirigeants d'entreprises ayant commis des fautes dans la gestion de leur entreprise. Elle est encadrée par l’article L653-1 et suivants du Code de commerce et vise à punir les comportements ayant conduit à l’ouverture d...
-
Droits des sociétés : TUP et liquidation amiable – Décret du 7 juillet 2024
Publié le : 12/09/2024 12 septembre sept. 09 2024Corporate, droit de sociétés, financementUn décret du 7 juillet 2024, passé pratiquement inaperçu, est venu modifier l'article R. 237-7 du code de commerce (liquidation amiable) et le décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 relatif à l'application de la loi n° 78-9 du 4 janvier 1978 modifiant le titre IX du livre III du code civil. Il...
-
Débits de boisson : ouverture, mutation, translation et transfert de licences
Publié le : 05/09/2024 05 septembre sept. 09 2024Corporate, droit de sociétés, financementLa gestion des débits de boisson est strictement encadrée par l’Etat et le Code de la Santé Publique, afin de contrôler et maîtriser la vente d’alcool sur le territoire français. Un débit de boisson est un établissement vendant des boissons alcoolisées sur place ou à emporter (bars, pubs...
-
Réduction de capital par voie de rachat des titres suivi de leur annulation : quelle imposition pour les associés sortants ? Le bénéfice du régime fiscal des plus-values sur cession de titres menacé ?
Publié le : 25/07/2024 25 juillet juil. 07 2024Corporate, droit de sociétés, financementDroit fiscalLorsqu’un associé souhaite sortir de la société dont il détient une participation, l’une des opérations possibles est de faire racheter ses titres par la société elle-même qui devra les annuler. Si le rachat des titres se fait à une valeur supérieure à leur valeur nominale, l’associé sortan...
-
Pratique des managements fees, vers un assouplissement de la jurisprudence ?
Publié le : 11/07/2024 11 juillet juil. 07 2024Corporate, droit de sociétés, financementDroit fiscalLa convention de management fees permet à un dirigeant mandataire d’une société de se faire rémunérer non pas, directement, par le versement d’une rémunération qui lui serait payée par la société lui ayant octroyé son mandat, mais indirectement par la société prestataire de services et rému...