
Point de départ du délai du créancier pour assigner son débiteur, ayant cessé son activité, en ouverture d’une procédure de redressement judiciaire
Auteurs : Nolwenn Geslin, Marion Fau
Publié le :
15/03/2023
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2023
L’article L.631-5 alinéa 2, 1° du Code de commerce dispose qu’un créancier peut assigner son débiteur, ayant cessé son activité professionnelle, en ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, dans le délai d’un an à compter de la mention de la radiation sur le Registre du Commerce et des Sociétés.
A l’occasion d’un arrêt en date du 18 janvier 2023, la Chambre commerciale de la Cour de cassation est venue apporter quelques précisions sur le point de départ de ce délai.
En l’espèce, un commerçant a adressé une demande de radiation au CFE le 21 février 2019 mais celle-ci n’a été fixée par le greffe qu’au 5 août 2019 « avec effet » au 11 mars 2019, date correspondant à celle de sa cessation totale d’activité. Suivant assignation en date du 15 juillet 2020, un créancier, ancien salarié du commerçant, a sollicité l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à son encontre, laquelle a été ouverte par le Tribunal.
Le débiteur a alors interjeté appel du jugement afin d’obtenir son annulation, reprochant au Tribunal d’avoir ouvert, à son encontre, une procédure de redressement judiciaire, sur une assignation, délivrée par son créancier, alors qu’il était déjà radié du RCS depuis plus d’un an. Selon lui, le point de départ du délai d’un an devait être fixé soit à la date à laquelle le CFE avait reçu sa demande de radiation, soit à sa date d’effet.
Au visa de l’article L.631-5 du Code de commerce, la Cour d’appel l’a débouté de sa demande au motif que « seule la date de la décision de radiation du RCS doit être prise en compte pour les commerçants, quelle que soit la date de cessation d’activité ». La radiation étant intervenue le 5 août 2019, l’assignation en redressement judiciaire du créancier du 15 juillet 2020 était donc recevable, même si l’activité avait cessé depuis le 11 mars 2019.
Le débiteur a alors formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt, soutenant que la date de la cessation d’activité devait constituer le point de départ du délai d’un an.
La Cour de cassation a toutefois rejeté son pourvoi, rappelant que « le délai d’un an prévu à l’article L.631-5 alinéa 2 1°, pour qu’un créancier assigne son débiteur en ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires, ne commence à courir qu’à compter de la date à laquelle la radiation du débiteur est mentionnée sur le Registre du Commerce et des Sociétés ».
Elle a précisé que l’action du créancier était donc recevable, peu importe la mention de l’extrait Kbis d’une radiation « avec effet » au 11 mars 2019, celle-ci étant « sans incidence sur le point de départ du délai en cause à l’égard des tiers ».
La Haute juridiction n’a, en réalité, fait qu’appliquer scrupuleusement la distinction opérée par l’article L.631-5 alinéa 2 du Code de commerce, entre :
- d’une part, les commerçants, pour lesquels le point de départ est fixé à la date de radiation du RCS (1°) ;
- d’autre part, les artisans, agriculteurs ou indépendants, pour lesquels le point de départ est fixé à la date de la cessation d’activité (2°).
En réalité, la jurisprudence ignore depuis toujours la date de la cessation d’activité du commerçant afin de ne retenir que celle de sa radiation au Registre du Commerce et des Sociétés (Com., 6 janvier 1987, n°85-16.524).
Cette position, bien que conforme au droit, impose en pratique au débiteur commerçant, cessant son activité, d’accorder une particulière vigilance à la date de la mention de sa radiation sur le Registre du Commerce et des Sociétés, au risque de voir retardé le point de départ du délai afin d’être assigné en procédure collective, notamment avec le nouveau guichet unique électronique des formalités des entreprises pour l’ensemble des démarches administratives des entreprises.
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